samedi 30 août 2014

HIER

Photo prise par un artiste irakien dans
un orphelinat



Hier, je n'étais pas née
Je sentais encore le doux liquide qui enveloppait mon corps.
Je rêvais.
Hier, j'étais dans un corps serré
Dans un corps balloté.

Hier j'étais dans le ventre de maman
Je me réchauffais des grands froids de ce dernier mois de décembre
Hier, j'étais dans ce corps déformé
Dans ce corps agité

Hier, je ne voulais pas encore sortir
Dehors, je pensais qu'il y avait du danger et que personne pour m'aider
Hier, j'étais dans ce corps violenté
Dans ce corps envahit


Hier, je n'avais plus de place dans cet abri lacéré
J'entendais des cris confus et lointain.
Je ne voulais pas écouter
Hier, j'étais dans ce corps enchainé
Dans ce corps lié.


Hier, j'ai décidé de ne plus bouger.
Je percevais le tumulte et des soubresauts qui me réveillaient.
Hier, j'étais dans ce corps tourmenté
Dans ce corps dérobé

Hier, j'étais prise en otage dans ce bateau égaré.
Je ne rêvais plus.
Hier, j'étais dans ce corps éreinté
Dans ce corps déchiré


Hier, j'étais encore incertaine
De naitre fille ou garçon et quand j'ai posé mon oreille
Sur le ventre qui m'a porté
Mon oreille m'a parlé.
Je n'ai rien compris
Je n'ai rien senti.
Je me suis endormie.

lundi 18 août 2014

Koan* Zen



" L'arbre qui tombe dans la forêt fait-il du bruit si personne ne l'entend ? "

*
"Les kôan sont de courtes phrases ou brèves anecdotes absurdes ou paradoxales utilisées dans certaines écoles du bouddhisme zen comme objet de méditation ou pour déclencher l’éveil. Il s'agit souvent d'une rencontre entre un Maître et un disciple ou toute(s) autre(s) personne(s). On les utilise dans le cours d'une forme de méditation qu'on appelle Méditation de Kôans"

PauSE




Découvert


La tentation de l'impossible

Je pose là, dans la blancheur de cette salle entourée d’yeux qui me figent et me peignent. Des yeux qui s’incrustent dans mon corps comme autant de lances qui me pénètrent. Je n’ai pas mal. J’ai toujours rêvé que l’on peigne la vision de mon corps, ses courbures, ses façades, ses couleurs, sa texture. J’essaie de me concentrer sur ma posture pour que la lumière se fige une bonne fois pour toutes et illumine mes détails. Je veux être belle.
Il est à nouveau venu. Il est là, l’homme au costume noir. Pourquoi ? Que cherche-t-il ? Il a ce regard différent sur moi ou, est-ce moi qui m’intéresse à lui ? Je prends le temps de le regarder. J’ai de la chance, il est juste en face de moi. Je ne vois que lui. Il porte toujours le même costume, ses traits sont beaux, son visage allongé, sa tenue toujours propre. J’aime voir dans ses yeux ce rayonnement. Est-ce parce qu’il jouit de peindre ou parce qu’il me peint moi ? C’est difficile à savoir, mais je veux paraitre heureuse et je crois qu’il me voit belle. C’est cela qui compte.
*
Il y a cette musique dans ma tête, splendide quand je promène mon pinceau sur cette toile blanche. Puis cette femme qui ressemble à des notes perdues sur une partition, qui pose là, à nouveau, qui est-elle ? Elle me fixe de son regard égaré à la recherche de je ne sais quoi. Que désire-t-elle ? Elle porte dans son corps la grâce de l’enfantement. Mon pinceau glisse sur la toile, laissant la trace des violences que je perçois dans le grain de sa peau si tannée, alors que paradoxalement elle est si gracieuse. Elle veut que je voie sa beauté, que je la dessine, que je donne des couleurs à son être. Elle veut que je prenne son corps peut-être, que je le fasse jouir. Elle s’ouvre à moi par son regard, me pénètre elle aussi. Que voit-elle ? Un pauvre mec coincé qui vient s’éclater en peignant des nus ? Un homme d’affaires qui court par monts et par vaux et qui vient se masturber les yeux avant de poursuivre son boulot inintéressant et vide ?
Et elle, qui est-elle ? Son visage si beau est si triste et plein d’amertume. Tout ce mélange la rend surprenante. Elle a peut-être cru au grand amour un jour et l’a perdu pour toujours.
Elle doit avoir la trentaine sûrement. Son regard vitreux la rend presque hermétique aux autres qui la regardent eux aussi. Je pose un instant mon pinceau pour reculer, afin de mieux voir l’ensemble de mon tableau. On dirait qu’elle a bloqué son souffle. J’ai l’impression qu’elle attend de voir l’expression de mon visage pour respirer. C’est cela sa vie alors ! Attendre un frémissement de quelque chose pour exister ?
*
Ça y est c’est le verdict, à chaque fois qu’il recule, c’est une caresse ou le fouet. Je ne lâche pas son regard d’une seconde, je ne veux rien perdre. Il avance, recule, caresse la toile de petites touches rapides et régulières avec un pinceau plus fin. Que fait-il ? Mes cheveux, il doit peindre ma chevelure. Ah ces cheveux ! Toute une histoire. Oui de ce côté-là la génétique ne m’a pas raté. Toute mon enfance a été un cauchemar, et les séances de coiffage avec ma mère des supplices. J’en veux encore à mes parents de m’avoir donné une chevelure aussi compliquée à coiffer. Comment va-t-il la représenter, comment la voit-il ? Cela me fait sourire de penser encore à mes parents, toujours là malgré mon âge. Est-ce ma nudité qui me ramène à ma naissance ?
*
À quoi pense-t-elle ? Est-elle en train de m’imaginer nu moi aussi ? Elle serait déçue. J’ai un corps pubère encore malgré mes 40 ans et puis je n’ai aucune rondeur aux fesses, c’est mon drame. Un cul plat. À chaque fois, j’ai cette image de moi petit, passant mon temps à me contenir, à retenir mes émotions et j’imagine que mes fesses n’ont pas pu pousser. Je trimbale cette idée depuis toujours. Faut s’imaginer les parents que j’avais quand j’étais petit. C’était l’église tous les dimanches, l’aumône et puis surtout défense de parler de sexe sous peine de recevoir une raclée. C’était quelque chose de dégoutant pour eux. J’ai grandi dans les tabous, dans les non-dits, dans les silences. C’est con comme idée et pas très scientifique, mais bon, y’a peut-être un peu de vrai dans tout cela. Par contre, elle, quelle générosité et quelles fesses magnifiques ! Elle, elle devait avoir des parents compréhensifs, généreux, altruistes. Ce devait être des artistes voyageant tout le temps. Les parents rêvés quoi. Je délire sur son cul et sur nos parents, quelle connerie ! Elle sourit, elle est jolie.
*
Je vois qu’il se rapproche de la toile et attend, un léger rictus aux lèvres. Il me sourit, c’est moi sur la toile. Je réponds par un sourire timide, mais sincère. Il soulève la tête pour me regarder en vrai.
Pourtant il ne répond pas à mon désir de contact avec lui : il est resté avec la représentation de moi sur la toile. Je suis pourtant réelle et en chair… J’insiste. En vain.
Je crois qu’il dessine mon postérieur, cela se voit à sa manière de se pencher sur le côté pour voir les détails. J’aime cette partie de mon corps si ronde, si parfaite, c’est le seul endroit de mon corps bien posé, harmonieux et stable : sûrement mon centre de gravité.
Il se concentre. Il me juge ? Non. Il n’est pas là pour ça. Il est venu réaliser un corps, peut-être m’accompagner dans mes doutes et mes incertitudes. Il est peut-être venu libérer ce que renferme mon corps ? Qui sait !
Il a l’air de tracer à présent des ondulations assez longues, son geste est plus ample : mes rondeurs probablement. Non mes audaces ! Il se concentre sur mon corps, mais que lit-il ? Nos regards se chevauchent. J’ai croisé ce même regard ce matin quand je suis entré avec mon peignoir dans l’atelier. Un regard plein de tendresse et de chaleur. Nous n’avions pas échangé un seul mot, ce n’était pas la peine. De toutes les manières j’étais trop occupé à penser à ma posture, à construire mon image, celle que je crois vraie. J’avais encore une fois le cœur plein de palpitations, et la peau de sueurs. Mes mains étaient moites et crispées.
— Quelle posture voulez-vous que je prenne ? Lançai-je nerveusement au professeur en arrivant.
— Comme vous avez envie d’être, répondit-il, la nudité est personnelle, c’est vous qui la façonnez.
Sa réponse délicate je la connaissais, mais je voulais gagner du temps afin de décider ce que j’avais envie de montrer de moi ce jour-là. Je lui répondis par un sourire en coin sans conviction, et je me dirigeais vers la scène. Oui une scène, je me mets en scène, je me joue, je me parle, je pose mon âme là sur cette estrade.
Les artistes ont eu la finesse de s’occuper ailleurs, afin de me laisser m’installer comme je l’entendais. C’est nouveau dans la vie pour moi, de choisir ma position, d’être libre de m’interpréter. Oui c’est cela, mettre en lumière ce que je passe mon temps à cacher.
Encore une fois ce matin, je me suis demandé pourquoi j’étais venue. Des doutes nouveaux. C’est fou comme la vie est faite. Je suis nue, sur cette scène, j’offre mon corps à l’interprétation de ces personnes alors que je me cache à longueur de journée, que je n’existe presque même pas ? Et là tous ces yeux qui peignent en silence mon intimité, qui peignent dans mon intimité profonde. Oui c’est cela que je suis venue chercher, mon intime mis à nu, mon corps libéré de toutes entraves. Je reste les yeux ouverts pour voir mon spectacle, c’est moi l’actrice. Mais je dois quand même improviser, c’est bon tout de même l’imprévisible. Ma vie est tellement dessinée et remplie de probabilités. Un mari, une maison, des enfants.
*
Quel courage cette femme ! On le sent à sa posture si souveraine et sereine. J’essaie de ne pas montrer mes émotions, elle doit sentir que je ne suis pas venue pour la juger ou la jauger. Comment lui faire savoir que je l’admire dans ses formes, mais aussi dans ce qu’elle dégage de son âme ? C’est un poème, un univers. Je me régale à la traduire.
Un poème nostalgique malgré tout. Elle porte tant de minces blessures sur son enveloppe. Mais lesquelles ? Et ses sillons sur son corps si jeune ? Quel destin a labouré son champ ? Des grossesses ? Des enfants oui, elle en a sûrement. Elle est pourtant si jeune, si infantile.
Ses yeux croisent mon regard questionneur. Elle ne sourit pas, mais relève la tête comme si elle voulait me lancer un « je suis libre ». Je la crois : je vois son corps immortaliser sa liberté, mais aussi une certaine retenue, un regard soumis et distant. Que de paradoxes chez cette femme ! Est-ce mon pinceau qui la fait vibrer ainsi ? Pourquoi pose-t-elle ? Qu’est-elle venue chercher ?
Le temps a passé très vite.
Dans l’atelier un mouvement frémit. C’est la pause. Le professeur se dirige vers le modèle et lui tend son peignoir. Elle a un rictus forcé. Je m’assois sur le tabouret installé derrière moi, j’affine quelques traits avant de poser mon pinceau. Elle se retire silencieusement, mais pas avant de me jeter un regard complice et presque tendre. Elle repousse délicatement une mèche de cheveux avec sa main gauche, qui porte une alliance à l’annulaire : elle est mariée. Son geste accompagne sa démarche si sûre d’elle.
Est-ce que je vais lui parler ? A-t-elle envie de parler à un mec comme moi en costume cravate, coincé comme pas possible alors qu’elle c’est une femme libre, pleine de respirations et de certitudes ?
J’en profite pour me dégourdir les jambes et aller fumer une cigarette dehors, histoire de décompresser, je ne dois pas me tromper sur elle dans ses espérances, elle parait si fragile.
*
Ce matin je me suis réveillée légère et vivante. Je savais que cette séance serait importante pour moi, comme toutes les autres fois d’ailleurs. Je m’étais organisée pour pouvoir passer à nouveau la journée ici, à l’atelier. Ce n’était pas facile, mais cela valait la peine. Je me suis préparée, habillée après avoir emmené les enfants à l’école. J’ai passé deux heures à m’épiler les jambes, le visage, à me faire des soins de beauté. Ce cérémonial faisait partie de ma liberté, celle de retrouver mon estime, ma force, ma confiance en la vie. Si difficile parfois à construire dans le monde superficiel et hypocrite dans lequel je vis.
Ce choix de poser nue c’est moi qui l’ai fait. J’avais peur c’est certain, mais je devais dépasser mes craintes et affronter les vrais regards, celui des autres, mais aussi le mien et les affronter sans apparats, sans faux semblants. Juste nue face à moi-même. Ces gens-là, qui sont-ils dans ma vie ? Des artistes qui sondent le corps, l’âme, qui convertissent les traces de la douleur en beauté picturale ? Je n’ai pas le temps de penser à ma nudité, je vis sous son leur pinceau, et surtout sous ses doigts, à lui, le temps d’une pause (pose). Le temps de changer mon regard sur moi ?
J’ai besoin de m’isoler, pourvu que l’homme au costume ne vienne pas rompre ma paix. Je le vois sortir, je suis soulagée. J’ai besoin de distance dans cette proximité.
Le professeur me rejoint malgré tout au bout de 15 minutes, m’invitant à trôner sur mon socle. Un socle dont je ne dépends pas, un socle qui m’a rendu ma liberté encore une fois aujourd’hui.
*
Elle revient, encore plus sûre d’elle. Elle est tout ce que je ne suis pas : le courage, la confiance, la force intérieure. Moi je suis là à essayer de vaincre mes peurs, ma vie sans profondeur. Je témoigne dans le silence de sa naissance mise à nue. Elle sent mon trouble, elle reste accrochée à mon regard. Heureusement que j’ai la peinture pour m’extirper de mes complexes. Au moins là j’ai l’impression de créer du sens. Sinon, qu'est-ce que vendre, acheter à longueur de journée ? Je manipule les gens, l’argent, le temps, l’espace. Pourquoi cette femme suscite-t-elle tant de questionnement ? Qui est-elle ? D’où vient-elle ? Que fait-elle de ces journées ? Que de mystères pour moi !
*
Les autres me fixent aussi, très sereinement ; J’arrive à reposer mes muscles, je sens autour de moi de la bienveillance et les pinceaux dansent sur les toiles avec une concentration apparente. Ce n’est pas comme cette fille dans le bus, ce matin. Elle était montée à l’arrêt Poincaré et m’avait un peu bousculée pour s’assoir juste en face de moi, c’était la dernière place assise, on sentait de la défiance dans son regard. Cette place était la dernière de libre : je percevais dans son attitude qu’elle n’avait pas eu le choix. Je lui dis bonjour, elle ne me répondit pas et détourna son attention vers l’extérieur, la ville, le vide. Elle portait un joli débardeur bleu d’outremer, des sandales, un short court qui lui allait si bien. Je la regardais au travers de la vitre et de temps en temps je la contemplais dans les yeux pour scruter son visage si joliment dessiné. Je tentais des sourires, mais aucune réponse. Je l’imaginais bien, ce matin, passer du temps comme moi à se préparer, son visage respirait, ses jambes étaient belles, nettes et paraissaient douces. Mais, elle semblait avoir peur de moi. Comme beaucoup d’autres d’ailleurs, je le vois tous les jours. Elle est jeune et déjà des certitudes, mais, peut-être que je me trompe après tout. Les apparences, j’en connais un morceau.
Et toutes ces personnes dans cette salle lumineuse qui maintenant me regardent avec des yeux admiratifs, pleins de générosité, de bienveillance et d’intérêt. Nos vies se superposent dans l’ignorance que chacun entretient avec l’histoire des autres. Tout à l’heure on m’ignorait et là, je suis le centre de gravité de ces personnes. Je me rends compte que cette fille aurait pu être l’une des ces artistes, elle m’aurait souri peut-être, ici. Je suis là pour ça : faire ce que je crois, pour moi avant tout.
*
Cela fait deux heures qu’elle n’a pas bougé. Ses paupières se ferment au ralenti de temps  en temps, donnant au tableau une touche magnifique. C’est comme cela que je l’ai peinte, les yeux fermés, mais le cœur plein et ouvert. Je traque ces moments où elle va fermer ses yeux.
Je sens du mouvement dans la salle, la séance va bientôt s’achever. C’est vrai, la lumière n’est plus la même. Je n’avais même pas remarqué. Le défaut de mon métier : je ne prends pas le temps de ressentir, d’éprouver. Heureusement je me soigne : la peinture me soigne.
Le professeur lui tend à nouveau le peignoir, elle se lève, sourit aux gens. Chacun la remercie pour sa patience, son don. Je n’ose pas m’approcher d’elle, j’ai peur de toucher un rêve de trop près et de le voir s’écrouler, alors je reste assis sur mon tabouret. Elle fait le tour de la pièce avec son peignoir, observe les tableaux sans un mot, mais son sourire en dit long : elle semble encore plus fière, d’elle, de ce qu’elle nous inspiré. C’est beau à voir. Elle salue tout le monde, tout le monde la salue chaleureusement, puis elle dit au revoir et sort.
J’ai pourtant une envie soudaine de lui parler, d’échanger avec elle, de lui offrir ma toile, je ne sais quoi. Je nettoie rapidement mes pinceaux. Oui, je veux bavarder avec elle, lui offrir un verre, voir décliner le jour et ressentir cela avec elle. Vite, je sors de l’atelier. Au compte-goutte les gens émergent, l’air apaisé et content. Le temps passe. Je l’attends encore, sous l’abri bus, en face. La porte claque, je lève les yeux brusquement… une femme, vêtue d’un voile beige de la tête aux pieds, en sort. Mon cœur bat la chamade : est-ce le modèle ? Elle traverse la rue, me sourit. C’est elle et je n’en reviens pas. Mais je lui souris à mon tour. Des myriades de questions foisonnent dans mon cerveau trop petit pour tout comprendre. Elle est vraiment mystérieuse.
Je la salue, je me présente à elle, elle me tend la main. Je suis tout bête, je me demande en quelques millièmes de seconde comment je dois me comporter. C’est ridicule, y a une heure elle posait nue, là pour moi, et maintenant j’hésite à croiser son regard.
Ma gène ne dure heureusement que quelques millièmes de seconde, car elle me propose d’aller boire un verre quelque part. Je répondis par un oui confus. Nos pas se dirigent vers les quais, un endroit magique pour voir baisser le jour.
Elle a commencé avec une certaine aisance et sans pudeur à me raconter sa vie. Son arrachement à son pays, l’Algérie, son mariage forcé à 17 ans, ses 2 enfants et les cours qu’elle prend pour se libérer du joug de son mari et de sa belle mère. Elle veut le quitter, les quitter, elle veut vivre sa vie et offrir autre chose à ses enfants, mais elle ne peut pas le faire n’importe comment. Elle doit travailler, pour avoir la garde des ses enfants.
Elle est aussi belle et gracieuse dans son voile qu’elle l’était, nue ; digne et tellement vraie. Je lui raconte ma vie, ma petite vie. Elle s’intéresse à moi, m’interroge sans tabous, elle voit de la profondeur dans ma superficialité, elle me voit moi.
Le temps s’écoule, les gens se dépêchent de rentrer chez eux, on doit se quitter. Elle me salue, et me lance avec assurance :
— Au fait je m’appelle Samar, cela signifie « conversation du soir ». Et toi c’est quoi ton prénom ?
— Jonathan, je m’appelle Jonathan. À cet instant c’est moi qui ai pris un temps d’arrêt, une pause. C’est à mon tour d’attendre, un frémissement, un « à bientôt »…

Texte écrit à partir des visuels de Magritte